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Balades
archéologiques...
Le mystère du
Chasseron
Sommet du Chasseron vu depuis la Gare CFF d'Yverdon. En cliquant sur l'image pour l'agrandir, vous distinguerez facilement l'Hôtel. |
Même si, déjà au XVIIIe siècle, des monnaies romaines avaient été retrouvées au Chasseron, on peut dire que tout commence en 1850, comme en témoigne un article paru dans la Gazette de Lausanne:
Il y a quelques semaines, un jeune homme occupé à herboriser au pied du Chasseron trouva une médaille romaine en arrachant une plante. Ce fut bientôt connu à Fleurier et à Sainte-Croix. Dès lors, un grand nombre de personnes de ces localités ont fait des fouilles sur les lieux et ont trouvé, jusqu'à présent, environ deux cents médailles romaines, la plupart bien conservées et portant des empreintes très variées. On a trouvé aussi des briques, des fragments de vases, des clochettes presque intactes d'une forme particulière, des instruments en fer, etc. (...)
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Monnaie trouvée au Chasseron:
Avers: TI CLAUDIUS CAESAR AUG PM TR P IMP (Tiberius Claudius Caesar Augustus Pontifex Maximus Tribunicia Potestate Imperator)
Revers: CONSTANTIAE AUGUSTI (à la Constance d'Auguste)
Source: Colin Martin, Trésors et trouvailles monétaires racontent le Pays de Vaud, Lausanne, 1973 (Bibliothèque Historique Vaudoise, n°30) |
Autrement dit, le pillage du site avait commencé! Mais les archéologues s'interrogeaient : Certes, on avait bien retrouvé des monnaies romaines dans les montagnes helvétiques, au col du Grand-Saint-Bernard au XVIIIe siècle, puis, en 1854, au col du Julier, mais, dans ces deux cas, on devinait le geste de voyageurs désireux de se concilier le Ciel pour la suite de leurs pérégrinations... Il devait s'agir de présents pietatis causa pro itu et reditu...
En revanche, le Chasseron n'était pas un passage obligé! Comment expliquer qu'on y ait amené de l'argent et des objets précieux? Les aurait-on enfouis là-haut pour les préserver d'une invasion barbare ?
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La plaine et le lac de Neuchâtel vus du Chasseron le 23.7.2005, journée des "Portes ouvertes"... on voit bien les contrastes d'ombre et de lumière dont parle Julien Gruaz!
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Dans un article paru en 1913 dans la Revue Historique Vaudoise, Julien Gruaz propose une autre explication. Il pense au "culte que les Gaulois et les Romains vouaient à leurs divinités sur certains lieux élevés" et il écrit, non sans lyrisme:
Au regard d'un espace immense où se propagent à l'infini la variété des sites et la molle ondulation des lignes; où les contrastes d'ombre et de lumière, les orages et les intempéries déploient de puissants effets, il semble que la vénération des sanctuaires au sommet des montagnes devait associer au culte des dieux l'impression qu'exercent en tous temps sur l'âme humaine les forces de la nature.
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L'équipe du Professeur
Luginbühl a complètement dégagé les murs du sanctuaire
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Néanmoins, comme l'avoue Julien Gruaz, l'hypothèse d'un sanctuaire au sommet du Chasseron était basée "non sur des traces de construction dûment observées, mais uniquement sur des trouvailles de monnaies nombreuses, d'objets divers et de fragments de tuiles épars". Ce n'est donc que lors des fouilles des étés 2004-2005 que l'on découvrit et dégagea complètement les fondations depuis longtemps soupçonnées du temple, ou plus précisément du fanum gallo-romain! |
Débris de tuiles du fanum...
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Les jeunes archéologues trouvèrent, entre autres, de nombreux fragments de tuiles dont les emplacements furent soigneusement observés. Il est ainsi possible d'imaginer la manière dont le temple s'est effondré... |
Dessin évoquant le sanctuaire gallo-romain de Studen (petit village à 4 km au sud-est de Bienne)
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La figure ci-contre donne une idée de ce que pouvait être un fanum gallo-romain... Comme il n'existait de dogmes religieux ni chez les Celtes, ni chez les Romains, il fut très facile à ces derniers d'établir des équivalences entre leurs propres dieux et ceux des peuples "amis"... C'est ainsi que Jules César affirme que Mercure est le dieu le plus honoré des Gaulois (Bellum Gallicum, livre VI, chap. 17). En fait, il devait s'agir du dieu Lug (dont on retrouve le nom, par exemple, dans Lugdunum, la ville de Lyon). Voir à ce sujet l'intéressante page de Sonia Arnal dans Allez savoir (Magazine de l'Université de Lausanne) qui se réfère aux travaux de Nicole Jufer et Thierry Luginbühl. |
Collier gaulois, ou "torque".
Peut-être était-il au cou de la statue du dieu... |
Le docteur Campiche, domicilié à Sainte-Croix, avait heureusement pris soin de recueillir une partie des trouvailles faites au Chasseron depuis 1850. En 1861, sa collection fut acquise par le Musée d'archéologie de Lausanne. Le collier gaulois, ou torque, reproduit ci-contre en fait partie. Sur le site du Musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, par exemple, on lit qu'un tel collier ne pouvait orner, à partir du 1er siècle av. J.-C., que le cou d'un dieu ou d'une déesse... |
Hachettes votives trouvées au Chasseron
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Autres objets confirmant le caractère sacré de l'édifice: ces hachettes votives. Celle du haut provient des fouilles de 2005 et se présente encore comme à sa sortie de terre!
Dans sa page de textes consacrés à la religion dans l'antique Lousonna, Laurent Flutsch écrit que "ces haches miniatures, qu'on trouve surtout en Helvétie, symbolisent peut-être l'offrande d'armes et d'outils". |
Dessin représentant le fanum gallo-romain de Langensoultzbach (Alsace). On sait qu'il était consacré à Mercure.
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Conclusion de l'archéologue cantonal Denis Weidmann, selon l'article d'Emmanuel Barraud paru dans le 24 heures Nord vaudois - Broye du 22.07.05:
Une hypothèse sur laquelle se sont penchés de nombreux chercheurs vient enfin de trouver sa preuve scientifique... La présence d'un sanctuaire ici était connue depuis longtemps. Maintenant nous connaissons son importance.
Par ailleurs, nous ne pouvons que souscrire au voeu exprimé par Thierry Luginbühl dans le même article:
Nous aimerions que des fonds se dégagent pour faire de ce site un lieu de visite privilégié.
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En dernière nouvelle...
• Dans l'intérêt même de leur conservation, les vestiges ont été à nouveau recouverts. Mais Jean-Marc Paratte nous offre, en QuickTime, une superbe vue panoramique de la fouille...
• Jeudi 28 juillet, quatre archéologues ont exploré le gouffre des Illars situé à proximité du temple du Chasseron. Le rêve eût été d'y découvrir une statue de Lug-Mercure... mais pour le moment, cette piste est restée infructueuse (Voir le 24 heures Nord vaudois - Broye du 03.08.2005, article d'Emmanuel Barraud).
Signalons enfin l'article de l'Agence Télégraphique Suisse paru le 21 juillet 2005 sur le site de la Télévision Suisse Romande.
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