Un de nos correspondants nous signale qu'à propos du nom "Sacripant", nous sommes tombés dans l'erreur de la plupart des dictionnaires qui qualifient ce personnage de "faux brave". Nous le remercions de sa contribution que vous pouvez lire ci-contre.
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Courrier
des lecteurs Sacripante
: marionnette de 1 m. 40 réalisée par
Sacripant a-t-il réellement existé ? Il existe une référence italienne aux "célèbres brigands Sacripante, Bastellina et Marco Sciarra, chefs de bandes errantes qui, vers 1590, avec 1500 hommes, dont 600 cavaliers, envahirent les Abbruzzes et le Lazio. Il fallut, pour les vaincre, une coalition de Napolitains et de Toscans avec les troupes du Pape." Ces chefs de bandes étaient souvent d'anciens condottières sans emploi, qui ralliaient des miséreux sous leur bannière. Le même phénomène a existé en France avec les Grandes Compagnies, mais aussi un peu partout en Europe. Là non plus, on ne peut guère parler de bravaches. Il s'agissait de hors-la-loi plutôt dangereux et sans peur qui, en Italie, une fois pris, étaient écartelés... Certains auteurs parlent d'un phénomène social, un comportement de survie à tout prix pour des milliers de misérables voués sans cela à la famine absolue. Que signifie vraiment le nom "Sacripant"? Ni dans Boïardo, ni dans l'Arioste, Sacripant n'est un "faux brave", mais plutôt le contraire par sa bravoure et sa témérité un peu outrancières. Du reste, très peu d'auteurs retiennent encore cette définition qui semble périmée. Beaucoup même se limitent maintenant à une définition assez édulcorée de Sacripant signifiant un vaurien, un mauvais sujet, un petit diable, voire un garnement malicieux. Enfin, la langue évolue et il faut cependant une définition. Si vous pensez pouvoir modifier la vôtre à partir de ces données, je crois qu'il vous appartient de le faire selon vos certitudes. J'aurais pu dire : " Nom d'un célèbre brigand italien de la fin du XVIème siècle, et d'un célèbre héros du Roland Amoureux (1476-1494) de Boïardo, puis du Roland Furieux (vers 1502) de l'Arioste, doué d'un grand courage et d'une force prodigieuse. A d'abord eu, à tort, le sens de faux brave. Désigne maintenant un petit vaurien, un mauvais sujet, un garnement malicieux capable de mauvais tours..." Comment donc expliquer la valeur nettement péjorative qu'a eue le mot "sacripant"? Je pense que les académiciens ont été circonvenus, en leur temps, par la définition que Charles de Brosses, magistrat et écrivain français, Premier Président du Parlement de Dijon, a donnée, dans ses Lettres d'Italie, du cardinal Carlo Maria Sacripante, qui n'avait pas daigné le recevoir, alors qu'un conclave se tenait à Rome (vers 1739-1740), et qu'il désirait faire une visite à tous les cardinaux papables : "Sacripante, ci-devant trésorier apostolique, le plus fieffé coquin du Vatican, comme il n'a pas volé pour lui tout seul, on l'a fait cardinal, ce qui lui évite de rendre des comptes." De Brosses s'est vengé. Et tout le monde a suivi. Extraits de courriels adressés au "Dossier des latinistes" par M. Delmonte
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